MATCH RETOUR

6 heures du matin. Il fait radieux dans l’arrière-cour de l’hôtel que nous quittons. Ciel d’un bleu profond, soleil levant plein de promesses mais il fait froid : le thermomètre de la voiture indique 0 degré. La très bonne nouvelle météo consiste en la disparition du vent qui nous rendait fous hier. La mauvaise nouvelle météo est que la bise glacée va nous rattraper en cours de route, mais on ne le sait pas encore.

Pour l’heure, on est tout guillerets : une trentaine de kilomètres après avoir quitté Uyuni, nous voilà dans un décor sublime. Roches grises, vertes et ocres, terre rouge. Ca sent bon les canyons, les rios et les pistes rugueuses.

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La première impression est bonne. Le lit du premier rio est doux sous les roues mais cela ne dure guère. Deux kilomètres après le départ, on entend travailler les suspensions et nos lombaires… ornières, trous, bosses et ravines en bord de piste, tout y est. Le genre de terrain où même les tout meilleurs ne rouleront pas souvent plus de 400m en troisième ! Pendant plus de 60km les chocs et les coups de frein s’enchaînent sans répit.

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Impossible de prendre de la vitesse, on est régulièrement bloqués par une zone de trial ou quelque saignée menaçante.

« Ca va leur changer la vie ce début de spéciale ! s’enthousiasme Jean-Pierre Fontenay. C’est Rock n’Roll après le p’tit déj ! Là c’est typiquement le genre de secteur où tout peut arriver. Car la question stratégique est la suivante : rouler à fond en prenant de gros risque avec l’espoir de creuser un écart ? Ou préserver la machine en comptant sur un faux pas des copains ? Attaque ou défense, quoi. Comme je le dis souvent, ceux qui trouveront le juste milieu entre les deux options auront raison en arrivant à Salta »

Jean-Pierre Fontenay Vainqueur du Dakar 1999

Jean-Pierre Fontenay
Vainqueur du Dakar 1999

N’oublions pas qu’au lendemain de cette spéciale N°7, ce sera la journée de repos. Bien souvent, cette perspective éveille les gourmandises chronométriques. Je suis prêt à parier sur quelques pêchés d’orgueil qui s’avéreront sportivement funestes.

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D’autant qu’au sortir de ces 60km particulièrement cassants, ce sera loin d’être terminé. La piste se fait plus roulante mais c’est l’altimètre du GPS qui s’affole à nouveau : 4000/4200 et passage culminant à 4580m sur un kilomètre de crête. « Rouler à plus de 4000m, c’est fatiguant. Et ils en seront à leur quatrième jour d’efforts à plus de 3000m ». Lavigne est conscient du défi physique qu’il lance aux concurrents. « C’est pour cela aussi que l’on repasse en partie sur la trace de l’aller vers la Bolivie. Pas la peine d’en rajouter, ce sera déjà assez dur comme ça ».

 

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De fait, le chemin du retour vers l’Argentine ne sera le même que sur un tiers de la spéciale. Messieurs, les copilotes, pas la peine de prendre trop de notes à l’aller, le retour vous réservera quelques surprises. Notre journée se termine à la frontière Bolivie/Argentine, escale au milieu de la spéciale Uyuni-Salta. On est plus « qu’à » 3400m d’altitude. Sur le plateau, le vent soufflait à plus de 80km/h avec de bonnes grosses rafales qui secouaient les voitures à l’arrêt. La journée a été rude et pourtant nous avons fait quelques pauses. Les concurrents n’en feront –évidemment- pas. Je m’endors en me demandant si la résistance à ce « stage » en altitude sera un facteur déterminant pour les compétiteurs. Je crois bien que oui. Demain fin de la spéciale vers Salta.