J’avoue que je faisais partie de ceux qui pensent qu’une fois les lampions éteints, il est illusoire de chercher à les rallumer. Si j’ai changé d’avis c’est au parfum diffusé par Londres de septembre que je le dois.
Les Paralympiques 2012 laisseront une empreinte indélébile dans ma mémoire. Quinze jours n’auront pas suffi à éteindre la ferveur d’un peuple dont le souffle puissant aura suffi à rallumer et entretenir la petite flamme magique née de l'enfance.
Pour la première fois sans doute les JO (A leur insu ?) se sont offerts une prolongation flamboyante. Il parait qu’une autre frange de la population a pris le témoin des mains de ceux qui avaient joui du sésame olympique. Un public plus populaire, plus familial a investi par Javelins (Le TGV local) entiers le parc olympique. Contre 5 livres le droit de se promener, contre 10 celui d’accéder à l’un des sites de compétition.
Peu importe après tout ! La discrimination quelle qu’elle soit n’avait plus sa place. Albion loin d’être perfide a montré la voie à suivre. Populations colorées et tolérantes affichant fièrement leur différence, signes extérieurs de liesse et d’exubérance. Medias au diapason qui affichaient à la Une les portraits des héros d’une patrie reconnaissante. » Thank You. It’s been Emotional ! » Titrait l’Independent le lundi 9 septembre associant dans une mosaïque enchanté les visages des médaillés olympiques et paralympiques, appelés l’après midi à défiler sur la Tamise pour y recevoir l’hommage de la nation toute entière.
Blancs, noirs, unijambistes, manchots, aveugles, tétraplégiques, femmes voilées ou en tenue légère, nains et géants, jeunes et vieux, athlètes et games makers. Que sais je encore ? Pas question de sacrifier au tri sélectif. Une marée bleu blanc rouge promettait d’illuminer la Tamise.
« Ces athlètes qui nous rendent fiers d’êtres britanniques ! » Constatait dans un éditorial Jean Merrick, la chef du service politique du quotidien. Jessica Ennis et Mo Farah, Elie Simmons et Jonny Peacock, rois et reines de la fête, sources d’inspiration nouvelles pour concrétiser l’adage d’une Team GB galvanisée par l’évènement. « How 2012 should boost Britain. »
Dès la cérémonie d’ouverture le ton était donné. Sa majesté Elisabeth II en personne présidait la soirée. Pas question cette fois pour la reine d’être cornaquée par James Bond et de faire son apparition hélitreuillée sur le stade.
En choisissant comme parrain de la cérémonie, Stephen Hawking, les têtes pensantes plaçaient d’entrée le curseur très haut sur l’échelle des symboles. Les apparitions publiques de ce physicien théoricien de renommée mondiale dont la carrière scientifique s'étend sur plus de 40 ans, sont très rares. Hawking souffre d’une dystrophie neuromusculaire qui est attribuée à une sclérose latérale amyotrophique (SLA), sa maladie a progressé au fil des ans et l'a laissé presque complètement paralysé. L'éminent savant ne communique plus désormais avec le monde extérieur que par un ordinateur.
C’était comme si les messages distillés par le cerveau en ébullition de Hawking, prisonnier d’une coque inerte, émanaient d’un univers lointain mais attentif aux dérives qui menaçaient l’humanité.
« Depuis l'aube de la civilisation, les gens ont éprouvé une grande envie de comprendre l'ordre sous-jacent au monde. Pourquoi est-il comme il est et pourquoi existe-t-il un tout. Mais, même si nous trouvons un jour vraiment une théorie complète de ce tout, ce sera juste un ensemble de règles et d’équations.
L’essentiel reste le feu qui donne la vie à ces équations et façonne l’univers que nous cherchons à appréhender. »
Le personnage central de cette quête de connaissance s’appelle Miranda. L’héroïne shakespearienne de la Tempête.
La tempête se déchaîne dès la première scène de la pièce. Elle symbolise la vengeance de l'ancien duc de Milan, Prospero, miraculeusement échoué sur une île magique douze ans auparavant avec sa fille Miranda, après avoir été exilé par sonfrère usurpateur, Antonio. L'île réunit les naufragés de la tempête, « Trois hommes de péché », Alonso, le roi de Naples et son frère Sébastien, complices du cruel Antonio,ainsi que Ferdinand, le fils d'Alonso, et le fidèle Gonzalo. Tous sont dans cette île pour y découvrir la vérité.
Même Miranda devra apprendre à distinguer le bien du mal . Elle rejette Caliban, le fils monstrueux de la sorcière Sycorax, dont la nature ne lui permet pas de devenir un être civilisé. Elle tombera finalement amoureuse de Ferdinand, qui dans l'épreuve et le travail atteint la vérité.
C’est à cet exercice ardu que nous convie Miranda lors de la cérémonie d'ouverture. La jeune femme en fauteuil nous invite à regarder ce qui nous entoure avec émerveillement et curiosité. « Regarde les étoiles plutôt que tes pieds ! Tente de donner un sens à ce que tu vois et émerveille toi de ce qui fait exister l’univers. Sois curieux. »
Les livres nous sont d’un précieux secours. Ils bornent l’état des connaissances, nous fournissent des repères pour naviguer comme autant de bouées lumineuses pour éclairer l’immensité de l’océan.
» Sans livres le développement des civilisations eut été impossible. Ce sont les moteurs du changement, des fenêtres sur le monde. Des phares érigés dans la mer du temps. Prophétise Prospero le père de Miranda.
« Le plus grand ennemi de la connaissance n’est pas l’ignorance mais l’illusion de la connaissance » Constate simplement Hawking.
Lorsque Isaac Newton vit tomber une pomme sur le sol, il réalisa soudain, que c’était la même force, qui soutenait le merveilleux système solaire, les planètes et les comètes. La gravité est la même force qui peut nous extirper du trou noir pour ne jamais y retourner.
L’expression artistique sous toutes ses formes, pratique sportive y compris, peut modifier les attitudes, les préjugés et le regard que l’on porte sur les autres.
Birdy au piano interprète le « Bird Gerhl » écrit par Antony Hegarty tandis que David Toole, danseur étoile, né sans jambes, exécute en solo une chorégraphie à ses pieds à la seule force de ses bras. L’éblouissement est total. Tout était dit. Les jeux pouvaient commencer.