Loin des artifices, des évocations et des chorégraphies qui ont nourri la fastueuse cérémonie d’ouverture, Krasnaya Polnaja a vécu hier une journée ordinaire, justifiant plus que jamais à la veille des compétitions son statut de ville fantôme.
Sur la place principale de la petite station qui assure la desserte de tous les sites de compétitions, les bonnes volontés ne manquent pourtant pas. Un DJ sur une petite estrade mixe furieusement des titres branchés made in America. Quelques retraités réunis pour l’occasion brandissent fièrement des ballons multicolores. Un couple de danseurs grimé en clown se démène en cadence, tentant vainement d’inciter les rares passants à se joindre à la fête.
Je quitte les lieux avec dans la tête un refrain de Patrick Juvet réactualisé . « Où sont les fans ? »
Les JO fussent-ils hautement politiques et sécuritaires peuvent-ils se faire l’économie d’un public, d’une ambiance ? Le monde entier n’a perçu de l’évènement que le brillant cérémonial célébré dans l’enceinte futuriste d’Adler. Tout juste aura t-on noté que les téléspectateurs russes auront eu droit à un différé d’une quinzaine de secondes, au cas où… La menace pour l’heure demeure invisible.
Dans la rue centrale de Krasnaya Polnaja désertée par le grand public, se côtoient les soldats, les personnels accrédités et les petites mains. Des voix inaudibles, des regards fuyants. L'armée des mains qui inlassablement nettoie et balaie.
Le message visiblement est passé. C’est toute l’image de la Russie qui est en jeu durant la quinzaine. Me revient alors à l’esprit le témoignage d’un homme recueilli par mon confrère David Mallarme. Il lui confiait en substance.
« Je n’irai sans doute plus cueillir des framboises dans les bois avec mes enfants, mais désormais le monde entier saura que nous existons."
Krasnaya Polnaja « The place to be ? » Il est grand temps de passer à l’action. Tout à l’heure Martin Fourcade décrochera peut être la première médaille pour la France et alors s'envoleront tous mes doutes.