PLUS DE 500 KM...

 

Après une nuit dans un hôtel de Villa del Totoral, nous reprenons la trace de la spéciale où nous l’avions laissée. Au milieu des champs. Il est 7h30, le lever de soleil est magnifique, les ouvriers agricoles sont déjà au travail. Direction les collines qui dominent la plaine pour une belle partie de zigzag, de fermettes en fermettes. On serpente sous les arbres, la piste ne présente pas d’énormes pièges et nous progressons en mode balade, ralentissant pour saluer d’un geste à la portière, en passant devant chaque habitation. Les concurrents seront, eux, contraints au même exercice : durant le rallye le road-book indique qu’il est impératif de descendre sa vitesse lors de la traversée du moindre hameau et, par extension, de chaque village. L’annotation DZ suivie de la vitesse à respecter (30, 50 kmh) saute au yeux Pas la peine d’essayer de tricher, chaque Gps sur chaque véhicule est contrôlé à l’arrivée et moucharde tout contrevenant. Les pilotes inattentifs sont avertis ou pénalisés, les dangereux ou les imbéciles sont exclus de la course.

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Passées les collines, nous voici sur un plateau semi-désertique. On accélère franchement. La piste est de plus en plus large et donc de plus en plus roulante. Plus de hameaux, plus de villages ; la piste passe au large des zones habitées. Ce sera donc une centaine de km quasiment à fond avec, de temps en temps, de longues courbes ou plus brutalement des changements de direction à angle droit. Ici les meilleurs dépasseront les 160 km/h en pointe.

Ici, on roule en Ford Falcon

Ici, on roule en Ford Falcon

A 100 km de la spéciale la plus longue du rallye (un peu plus de 500km), la piste change à nouveau et le décor aussi : nous serpentons au milieu d’une végétation bien plus dense, cactus, acacias…

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Il y même un peu de sable sur le sol, rien de bien méchant mais c’est différent du sol très dur sur lequel nous roulions depuis le début.

Comme souvent sur le Dakar 2016, une partie du parcours des motos sera différent de celui des autos. Il s’agit de faire en sorte en sorte que les voitures de tête se retrouvent le moins souvent possible dans la poussière des dernières motos et d’éviter les dépassements hasardeux et parfois dangereux.

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Nous voici donc dans le crochet que les autos auront à effectuer en Janvier. Tiziano Siviero (traceur du Dakar 2016 : « Cette partie, on l’a repérée sur Google Earth, mais on n’a pas eu le temps d’aller la vérifier. On va voir maintenant si ça passe. Avec l’annulation du Pérou nous avons manqué de temps et nous avons été contraints de faire comme ça pour de petits bouts, comme les parties nouvelles ou les séparations autos/motos. »

Pour une fois, nous (Luis Alberto, notre pilote, Régis et moi) ouvrons le convoi des recos. Devant nous, au milieu de la boucle supplémentaire, deux barrières côte à côte. Nous ouvrons celle qui ne donne pas sur un terrain clos. 400m plus loin : cul-de-sac ! A droite une petite ferme, à gauche rien sinon une clôture, à moins que…

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Je distingue une barrière antique presque invisible dans la clôture derrière laquelle se poursuit la piste, à peine visible, tant elle n’a pas été utilisée depuis longtemps. On passe la barrière, on fait quelques centaines de mètres. Ca semble être bon. Demi-tour pour rendre compte. Tiziano et Marc Coma nous rejoignent. Coma me fait un clin d’œil : « ça va passer ». Le nouveau Directeur de course a vu juste. La piste est bien vieille mais elle est publique, au milieu d’une gigantesque estencia de maquis argentin. «  Ca vaut toujours la peine d’essayer, sourit Siviero, soulagé que le projet virtuel se transforme en tracé concret ».

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La nuit tombe à 40km de la sortie de la spéciale. Ce sera bivouac et fin d’étape pour demain. On installe le campement autour d’une ferme abandonnée juste au bord de la piste. La nuit tombe. L’heure de « l’asado » approche. C’est le moment que Marc Coma choisit pour…aller courir ! Baskets, short, T-shirt et lampe frontale, le voilà parti pour 45mn à 12km/h sur un chemin plein de cailloux, en pleine nuit ! Au retour je le questionne : pas assez fatigué par11h de secousses en tous genres , « Si bien sûr, mais cela fait 20ans que j’entraîne mon corps pour les plus grandes courses. Je ne peux pas changer de rythme de vie du jour au lendemain. Et puis ça fait du bien de courir, conclut-il dans un sourire. Ca défatigue… »

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Bon. Nous, on n’a pas couru. On a refait le monde du Rallye Raid sous les étoiles, à coup de souvenirs ou de pronostics pour le Dakar qui s’annonce. Mille anecdotes et bien des éclats de rire plus tard, on est allés se coucher en songeant que la nuit serait bien douce et réparatrice.

La suite, comme dirait Brassens, nous prouva que non.

Publié par Jean-Francois Kerckaert / Catégories : Non classé