Félix ou les tribulations d’un français en Chine. Le personnage de Félix est classer dans la catégorie de ceux qui souffrent de passer inaperçus. Dans celle aussi de ceux qui, en toutes circonstances refusent de se prendre pas la tête et qui abhorrent la solitude.
Félix est un actif infatigable et itinérant, tout le contraire d’un cérébral sédentaire et méditatif.
Voilà maintenant 4 années qu’il habite Pékin et qu’en travaillant dur son mandarin (sic), il est capable de déchiffre 60 à 70 % des caractères contenus dans un quotidien chinois. Mais Félix lit rarement le journal. A quoi bon ?
Et à cette simple évocation, il éclate de rire. Il a tant d’autres choses à faire. Félix rêve de monter sa propre société, d’utiliser au mieux ses talents de bateleur et de polyglotte. Félix est un joyeux drille qui se nourrit en permanence du contact humain. La réussite selon Félix consisterait à monter une petite société de service permettant aux chinois fortunés de découvrir la France et aux français aisés d’effectuer le chemin inverse.
De l’import export dans la communication en quelque sorte. Mais il lui faut pour cela trouver un partenaire chinois. C’est la loi. Un lao Wei seul ne peut espérer vivre du business en Chine.
Félix hésite. Il s’entend bien avec la jeune fille chinoise qui partage sa vie depuis quelques mois, mais peut-il vraiment capitaliser sur cette romance ? En dehors du fait que ses beaux parents
potentiels ne le considèrent pas comme un garçon fréquentable, les chinois aux dires de Félix arnaquent comme ils respirent . On ne peut jamais leur faire confiance.
Il faut toujours négocier d’arrache pied et quand enfin on pense avoir
triomphé, il faut se rendre à l’évidence, on a été floué.
Ah, nous ne connaissons pas notre bonheur d’aller acheter à la FNAC un produit
fiable, à prix fixe, garanti sans mauvaise surprise ! Félix cultive volontiers les clichés en batterie. Les hommes chinois sont laids, cela ne se discute pas (Sic) . Les pékinoises qui déboulent de leur cambrousse sont fringuées comme des sacs. La plupart en outre sont vénales. Quant à leurs performances à l’horizontale, Félix ne préfère même pas en parler.
Le soleil brille trop dans le ciel pour s’arrêter à de si pathétiques constats.
Quand il croise une fille un peu moins ordinaire que la moyenne, Félix lui déclenche son œillade spéciale appuyée puis quand elle prend conscience de sa présence, il se fend d’un malicieux Niihau (Bonjour). C’est à l’en croire la formule la plus efficace, même si les étrangers ne sont pas particulièrement bien vus.
Il n’y en a que pour les Han, l’ethnie majoritaire. Vu sous cet angle, la Chine de Félix est assez déprimante. C’est comme la bouffe carrément infecte. D’ailleurs Félix ne jure plus que par la baguette que l’on trouve dans les boulangeries françaises de Pékin. Pour l’heure, Félix accumule de la caillasse, autrement dit bricole, de petits boulots en petits boulots. Pas de quoi sauter au plafond.
A quoi bon enseigner le français lorsque l’on s’est éreinté les yeux sur le mandarin pendant tant d’années ?
Mais après tout Félix n’a que 25 ans et de croire si fort en son étoile peut lui ouvrir les portes de la gloire aux moments le plus inattendu.
La preuve, Félix a rallié Shanghai par le train de nuit uniquement pour être le fil rouge de notre petit reportage. Comme toutes les couchettes étaient réservées, Il a somnolé dans le wagon restaurant. 12 heures de trajet, une broutille pour un garçon aussi jeune et vigoureux. Il a déjà tenu 17 heures debout dans un compartiment bondé, en compagnie de chinois qui crachaient tous azimuts, sans vergogne.
Félix cultive une certaine forme de dérision. Pour rentabiliser au mieux ses prédispositions pour le baratin, il s’est lancé dans le rap chinois. C’est un morceau composé à la gloire du riz sauté, ce plat infect qui lui donne la nausée rien que d’y penser, qui a fait un buzz sur internet et justifie sa présence en vedette d’un jour, devant l’objectif de notre caméra. Félix a raté une bonne occasion de surfer sur la vague au deuxième dégré. Nouilles sautées en argot chinois signifie partouze.
Mais Félix jure qu’il ne le savait pas. Le voilà qui fait son show, se lâche sans retenue dans la rue de la bouffe, interpelle bruyamment les commerçants qui lui rendent ses sourires. Par moment il y a du Jean Dujardin dans son jeu. Félix mérite amplement son prénom, y compris quand les courants lui sont contraires. En cela il est à son corps défendant plus local que nature puisque les parents en Chine
cherchent pendant de longs mois, l’idéale association d’images qui bombardée comme prénom à l’état civil caractérisera le mieux leur rejeton.
Le père de Félix a visé juste. Son bienheureux fiston est un représentant de commerce pragmatique et philosophe qui croit dur comme fer en la bonne étoile qui lui assurera la fortune un jour prochain dans ce nouveau Far West.