La troisième victoire d’Andrei Greipel dans ce Tour ravive mon admiration pour ces coureurs qui endurent des centaines de km pour ne vivre vraiment que pendant 200 mètres, les derniers, ceux qu’une ligne blanche vient brusquement couper. Tels des diables à ressorts, ces énergumènes se démènent soudain de part et d’autre de la route, cherchent l’ouverture, la meilleure trajectoire qui les conduira à la victoire. Cette année Greipel. L’an passé Kittel. Et autrefois Charles Pélissier, André Darrigade, Jean Graczyc, Rik Van Looy. Et plus près de nous, mais loin déjà, les Freddy Maertens, Rick Van Linden, Mario Cipollini, Djamolidine Abdoujaparov ou bien sûr Erik Zabel, qui ramena le maillot vert à Paris six fois de suite entre 1996 et 2001. Un record.
Les sprinters sont une race à part. Ils sont la hantise des rouleurs lorsque, dans une échappée, les voilà qui tiennent les roues et ne seront pas décrochés avant la flamme rouge du dernier kilomètre. C’est le signe que ça va saigner. Ils enfoncent leur pointe (de vitesse) à coup sûr comme des tireurs d’élite ajustent leur cible. Les premières places ne leur échappent pas pour peu que l’arrivée soit large et plate, voire légèrement montante. Leur explosivité s’exprime alors sans limite. Le spectacle des sprinters à l’œuvre est toujours intense et riche en suspense. Qui va gagner ? A frotter si près, un de ces lévriers va-t-il chuter ? Magiciens funambules, ce sont des illusionnistes de haut vol. Leurs exploits se jouent en quelques secondes et ils nous marquent pour la vie.