Et c’est la raison pour laquelle Fred avait en secret préparé un come back qu’elle rêvait retentissant. Son objectif ressassé en elle-même : Se qualifier pour les championnats d’Europe de Bercy sur la plus courte des distances. Sur le papier la tâche ne semblait pas insurmontable. Bangue possède un record personnel de 7’’11 sur 60 mètres plat pour des minima fixés à 7’’30. Seulement voilà l’athlétisme est une discipline implacable et exigeante. Et le temps un adversaire qui finit toujours par triompher de toutes les chimères. Impossible de tricher avec un chrono à la main.
L’immense Marie José Perec s’est elle aussi cassé les dents sur cette course poursuite quasiment perdue d’avance même si je garde au fond de moi la conviction qu’elle aurait été championne olympique à Sydney si l’encadrement de l’équipe de France l’avait davantage protégé. Mais mon propos n’est pas là. Si Frédérique Bangue a décidé de revenir ce n’est pas tant pour l’îvresse de la vitesse mais pour prouver à ceux qui en douteraient encore qu’elle ferait une journaliste très convenable !
Du temps de sa splendeur, Fred faisait partie de ces athlètes qui crevaient l’écran. Toujours un bon mot, un sourire enjôleur dès que le rouge de la caméra s’allumait. Depuis longtemps elle s’était mis en tête de passer le jour venu de l’autre côté du miroir. Sitôt ses pointes remisées, emportée par la vague des talk show, elle accepte d’animer une émission de radio et de partager à mes côtés la présentation de « Soyons Sport » sur France 4. Elle cumule à cet instant aux yeux de ses employeurs toutes les vertus du prêt à consommer audiovisuel. Elle est jeune, belle, souriante et de surcroît femme ce qui dans le domaine du sport n’est pas si fréquent à l’antenne. Et la voilà propulsée dans la lumière sans aucune formation préalable. Malgré toute sa bonne volonté, son désir d’apprendre et d’écouter, Fred ne peut esquiver le mur invisible qui se dresse devant elle. Elle a vite l’impression qu’on la cantonne au pire dans un rôle de « Fofolle » au mieux dans un rôle de potiche. Dans ce mauvais jeu de rôle, elle perd sa bonne humeur et une partie de ses illusions et finit par s’exiler et couper les ponts.
Plus de cinq années se sont écoulées. Qui se souvient aujourd'hui de Frédérique Bangue en dehors des mordus d’athlétisme ? A imaginer l’avenir, elle panique, s’imagine convoquée dans une agence pour l’emploi. « J’ai un bac plus 5, je suis une ancienne athlète de haut niveau. » Et son interlocutrice de lui rétorquer. » Certes mais que savez vous faire au juste ? »
La reconversion. le grand mot (maux ?) est lâché ! Dans le monde du sport, qui s’en préoccupe vraiment ? Pour une Mauresmo, un Noah ou un Diagana, combien de champions oubliés, livrés à eux-mêmes, relégués dans l’anonymat de la vie. Fred décide d’exploiter cette thématique, de réaliser un documentaire sur la reconversion des sportifs de haut niveau. Et quel meilleur exemple que le sien ? Pour prouver qu’elle a compris la leçon, elle accepte de réciter ses gammes, de reprendre le journalisme par le bon bout.
Et qu’importe si le verdict est cruel. Malgré tous ses efforts à l’entraînement sous la houlette de Guy Ontanon, malgré tous les sacrifices consentis, le chrono se bloque sur 7’’70 très loin de Bercy et même des France. Mais Fred Bangue est de retour, qu’on se le dise ! Loin des sunlights ! Dans le journalisme de reportage, cette fois et pas pour y faire de la figuration. Welcome Consoeur !!