La FINA en rédigeant ses règlements a eu la riche idée de ne pas chercher à départager au millième les athlètes classés dans le même centième de seconde. Jérémy Stravius et Camille Lacourt qui ont nagé le 100 mètres dos en 52‘’76, remportent chacun la médaille d’or et le titre de champion du monde de la spécialité.
Les instances athlétiques en ont décidé autrement qui s’évertuent à chercher des différences, là où le cœur et l’œil nu se réjouissent de l’égalité. Seule la victoire est belle, répètent souvent les champions. J’ai envie d’ajouter aujourd’hui que lorsqu’elle est partagée avec un compatriote de surcroit, elle prend encore une dimension supplémentaire.
Je me souviens de ces deux marcheurs russes, Perlov et Potashov, unis dans la souffrance d’un 50 kilomètres marche lors des championnats du monde d’athlétisme qui se déroulaient à Tokyo en 1991.
Amis dans la vie, les deux héros après plus de trois heures et demies d’efforts décidèrent de franchir la ligne d’arrivée de concert en se tenant par les épaules. Je me souviens encore de l’émotion intense qui je ressentis à partager du haut de la tribune commentateur, l’intensité d’une amitié si pure. Des juges au cœur trop sec, obnubilés par la photo finish en décidèrent autrement, décrétant un premier et un second. Je me souviens encore de la tristesse des deux copains le lendemain sur le podium. Entre l’esprit et la lettre, seule cette dernière avait été privilégiée.
Tandis que j’écoutais la Marseillaise exécutée en l’honneur de Jérémy et Camille et que je lisais dans leur regard leur immense bonheur, j’eus soudain envie d’évoquer le destin contrarié d’Andrei et Alexandre. Comme si en les associant au triomphe des dossistes français, j’espérais 20 ans après leur rendre justice.