Réveil dans l’humidité . Comme souvent. L’océan Pacifique n’est jamais très loin et à cette période de l’année, le soleil ne perce jamais avant midi l’épaisse couche de brume côtière large de 20km en général. En janvier, l’été ici, les conditions sont météo différentes. Lorsque brume il y a, elle est moins dense et s’évapore plus tôt dans la journée.
Nous transperçons donc le brouillard en allant dans la bonne direction : une plaine rocailleuse qui nous attend sous un soleil éclatant. C’est du hors piste, cassant, comme on dit dans le jargon du rallye raid, nos voitures coupent perpendiculairement des sillons creusés par des centaines de petits ruisseaux éphémères, coulant ici pendant à peine 15 Jours, en juillet ou aout. Impossible de tenir une vitesse soutenue sur ce terrain tant les suspensions (et donc nos vertèbres) se mettent à souffrir au-delà de 40km/h. Une piste se présente assez rapidement. Elle va régaler les pilotes qui aiment faire dériver leurs carrosses à la moindre courbe. Une demi-heure de plaisir de glisse, à la manière des épreuves sur terre du championnat du monde des rallyes.
Puis c’est l’entrée dans un canyon. Plutôt large et roulant en son début, il se resserre autour des portières à mesure que nous avançons. Par endroits, il faut passer moins vite qu’au pas pour ne pas frotter contre la roche
Je demande à Juan Valvidia, notre pilote et correspondant d’Aso au Pérou, ce qui est prévu pour le passage des camions : « En fait, on a des machines pour élargir les passages trop étroits. On va élargir mais j’ai promis à David qu’ils n’en feront pas trop, pour que ça reste difficile et trialisant ». Ce serait dommage, en effet de « déblayer » cette partie de la spéciale trop largement et du coup, de l’aseptiser. D’autant que la suite devient franchement plus facile. Tout devient lisse pendant 30km. Nous sommes sur une piste quasi autoroutière, qui traverse des pueblos (petits villages) et des zones de culture. Il y aura pas mal pas mal de « DZ » sur ce tronçon : les véhicules auront obligation de ne pas dépasser le 50km/h d’un point à un autre. Le GPS installé dans l’engin de chaque concurrent constituant le meilleur gendarme qui soit. Il est relevé chaque soir à l’arrivée au bivouac. Les non-respectueux sont évidemment punis à coup d’amendes ou de sanction sportive.
Après cela, jusqu’à 20km de l’arrivée, la seule difficulté sera de ne pas aller trop…vite ! La piste est large, visible, les changements de cap faciles à décrypter. En revanche, « l’autoroute » pourrait se montrer fatale aux trop téméraires. Ca paraît plat, on a envie de foncer sans réfléchir et soudain, une saignée ou une série d’ondulations vous obligent à freiner après avoir encaissé un choc violent. Gare pour ceux donc, qui voudront en mettre un peu trop… « Je pense, me dit Etienne Lavigne, que c’est une partie où les pilotes des grosses écuries peuvent finir par faire des bêtises en se montrant trop gourmands sur la vitesse de pointe. Va peut-être y avoir de la carrosserie, comme on dit». Si nous nous sommes fait peur à 100km/h, on a pas de mal à imaginer que les meilleurs déboulant ici à 180 passent au stade de la frayeur, ou pire, celui de la cabriole…
Au départ à Lima, revenant sur la partie péruvienne de l’édition 2012, David Castera avait évoqué un seul reproche reçu des concurrents : « Ils ne se sont plaints que d’une chose : un excès de fesh-fesh qui parfois les a rendus fous ». La fin de l’étape Arequipa-Arica évitera l’overdose, mais la farine de sable et de poussière sera quand même bien là. Une série de collines rondes au sol très mou qui donnera du fil à retordre aux véhicules les moins puissants. D’autant que le chemin qui mène aux abris de pêcheurs juste avant la mer n’est pas simple à trouver, de goulets en petites vallées. Au bout de ce calvaire pour les embrayages, ce sera l’adieu au Pérou avec quelques derniers kilomètres le long du Pacifique pour passer la ligne d’arrivée.
1800km parcourus. La moitié en spéciales. Un tiers du rallye. C’est la fin de « nos » recos péruviennes. 9 jours de décors merveilleux. 9 jours rudes qui nous laissent à penser que le Pérou fera de réels dégâts sportifs, tant les spéciales sont variées et difficiles.
Castera et sa troupe poursuivent en ce moment leur route vers le Chili, puis le nord de l’Argentine. Ils s’arrêteront à Cordoba avant de revenir, en octobre, terminer l’écriture du road book. Et puisqu’ils ont promis de me donner des nouvelles, je vous en donnerai !